“Laser” game changer

Comment a-t-il été imaginé et conçu ? Quels matériaux le composent ? Combien de temps a duré sa fabrication ? Comment a été choisi le top modèle qui l’a porté lors du défilé? Les secrets d’un modele haute couture.

Chapitre 2

Les secrets d’un modèle Haute Couture : le look 14 de First Creatures

Ça fait très longtemps que je fantasme sur Captain Marvel, cette superhéroïne aux pouvoirs super puissants venus de l’infini.

Tout s’est joué sur un déclic textile. Quand Emmanuelle Canot, de Sfate & Combier, m’a présenté, en avant-première, un nouveau tissage technique nommé « laser game », tout à basculé dans ma tête. Pour la première fois, des tisserands traditionnels lyonnais, partenaires de la Maison Julien Fournié, projetaient dans le futur leurs matériaux.

Ce tissus mélange six teintes de lurex différentes sur une base de soie, ce qui confère à cette matière, le scintillement des étoiles et la transformation des couleurs visibles sur les ailes de scarabée. Ce tissage léger, multivers, et changeant n’est pas une broderie. « It’s a game changer ».

Très vite, la simplicité de la ligne de la robe s’imposait. C’était le matériau que je devais mettre en avant. Je voulais créer un choc visuel comme si un trou noir avait absorbé toute la lumière, c’est pour cela que j’ai décidé d’allier un autre tissu sur cette robe : un jersey de soie et de viscose noir profond, avec une découpe « raie manta ».

Trait de lumière

Finalement, un des secrets d’un modèle Haute Couture tient souvent à une idée : cette robe n’est qu’un trait de lumière, soulignant les courbes féminines. Un décolleté en tulle illusion, un clin d’œil à l’étoile de Star trek, et tout est dit. Les manches mitaines allongent encore plus la ligne. Quant à la traîne Éole, elle est comme une balise poursuivant la silhouette.

Pour concevoir un jacquard de lurex, il faut deux mois de tissage de grande précision sur les machines de Sfate & Combier. L’atelier en agitation, devant un tel tissu, a fait un travail remarquable pour assembler une matière sèche et luisante avec un jersey mou et facilement déformable.

C’est Madame Jacqueline, la première d’Atelier, qui trouve à la solution pour la fabrication du décolleté mystère dont je rêvais. Lors d’une pérégrination, je tombe sur un stock vintage de cristaux exactement dans les couleurs du « laser game ». Je n’ai pas pu m’empêcher de les utiliser pour souligner la brillance du décolleté.

Electrique et nonchalante

Une fulgurance ! Ça ne pouvait être Sally Diagne. Grande, sportive, épaulée, toujours concentrée, cette jeune femme est parfaite pour performer sur le podium, avec son attitude électrique et nonchalante de sa génération.

Allo Nicolas ? Qu’est-ce qu’on fait avec ce tissu de ouf ? Il me répond, comme à son habitude, avec beaucoup de mystères, laisse-moi faire. Monsieur Mystère va me concocter exactement la lumière de la robe dans une texture inédite pour la bouche de Sally.

Il n’aura fallu qu’un mot prononcé à Jack, du salon Neville, à savoir Alien. Ce génie anglais dans son effervescence créative, alors que mon téléphone coupait toutes les cinq minutes, me lançait : Prometeus bip, Godess of Egypt bip, Tentacules bip, et futurisme bip. Une sublime sculpture de cheveux

Le jour J, prête à partir sur le podium, Sally m’impressionne et son regard fardé de noir me rappelle sa bienveillance et sa détermination. Elle est prête.

Photos : Delphine Royer